Sous-traitance de la détention : une menace sur les droits humains

De plus en plus de pays, comme le Royaume-Uni et le Danemark, sont tentés d’externaliser sur des pays tiers, et si possible hors Union européenne la gestion de l’enfermement des détenus et/ou des étrangers en attente de reconduite dans leurs pays d’origine. Des voix se sont aussi élevées en France dans le même sens.

Une pratique incompatible avec la dignité humaine

Or, l’éloignement vers un pays tiers dans lequel la personne retenue n’a aucune attache et au surplus sans aucune vérification des prérequis nécessaires à un enfermement respectueux de sa vie, n’est pas compatible avec l’exigence de dignité et ne peut qu’être source de souffrance. Elle traduit une volonté de déshumaniser celui qui est réduit à son statut de « Migrant » ou d’ « étranger expulsable », nécessairement assimilé au délinquant. 

Un conflit avec les droits humains 

Cette politique qui prône une certaine forme d’efficacité heurte donc l’acception des droits humains reconnus par les pays membres du Conseil de l’Europe et en premier lieu la dignité inhérente à tout être humain quelle que soit sa condition. Les droits humains sont équivalents et leur défense, dans un pays démocratique suppose la recherche d’un équilibre nécessairement fragile entre eux. La dignité commande des lieux de détention et de rétention respectant des principes élémentaires, comme le droit à l’intimité, à l’hygiène, à la santé, au maintien des relations familiales et à l’assistance juridique.  

Sécurité versus sûreté : un glissement dangereux

L’ensemble des droits humains à l’efficacité d’un droit à la sécurité. Ce droit n’est pas un droit de l’homme et est construit abusivement par le jeu d’une confusion avec le droit à la sûreté qui est celui à ne pas être détenu arbitrairement. Le mouvement actuel mettant en avant la protection des citoyens est le prétexte à la régression actuelle de l’espace de nos libertés publiques par la hiérarchisation de droits équivalents qu’il convient au contraire d’harmoniser.  

Le condamné, un être humain à part entière

Il faut réfuter l’affirmation qu’un condamné n’a pas le droit de participer au contrat social, et ne saurait bénéficier de ce fait de la protection du droit. Le condamné, étranger ou non, est un être humain. Les politiques proposées heurtent donc les engagements internationaux qui lient les Etats et gouvernent notre conscience. 

En France, l’échec de la réinsertion 

La détention pensée par la déclaration des droits de l’homme de 1789 tend à l’abolition de toute torture et de tout traitement dégradant au profit de la réinsertion par un travail sur soi et l’éducation. La France est loin d’y avoir consacré les moyens nécessaires et l’opinion publique se satisfait des conditions dégradantes de vie qui ont court dans la plupart des maisons d’arrêt du fait de la surpopulation. L’accompagnement éducatif et social des personnes détenues est insatisfaisant, du fait du manque d’encadrement.  

La position

La Commission des Droits de l’Homme de Pax Christi s’oppose à la tentation de cette politique de sous-traitance vers des pays tiers des problèmes que nous n’arrivons pas à résoudre. Elle participe à la dégradation des principes sur lesquels nous tentons de maintenir notre régime démocratique. 

Commission des Droits de l’homme de Pax Christi, 28 novembre 2025

Pour aller plus loin, comprendre les différences juridiques fondamentales entre le droit à la sécurité et le droit à la sûreté selon la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) : Le droit à la liberté et à la sûreté dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme