Élèves en école élémentaire, il y a quelques années déjà, nous étions impressionnés lorsque la maîtresse abordait les chapitres de la « guerre de cent ans » (1337-1453) ou de « trente ans » (1618-1648). Bien que notre notion du temps fût encore imprécise, nous nous demandions comment il était possible de se battre sur une aussi longue période. Mais c’était dans un temps qui nous paraissait bien lointain.
Que dirons nos petits-enfants … lorsque leur maître ou maîtresse abordera le conflit entre Israéliens et palestiniens ou la guerre en RDC dans le Kivu… ? Ce qui nous paraissait d’un autre temps se déroule encore aujourd’hui dans des conflits qui durent des décennies. Nous n’avions pas conscience des souffrances que les hommes de ces époques pouvaient s’infliger, de l’étendue des destructions. Aujourd’hui nous savons en temps réel ce que la haine, l’esprit de vengeance, la prédation des richesses … engendrent comme souffrances indicibles, comme déshumanisation qui conduit aux pires cruautés.
Mais nous savons aussi qu’il est possible de sortir de ces spirales infernales.
Le mouvement PAX CHRISTI fête en 2025 ses 80 ans. C’est l’action pour la réconciliation franco-allemande qui en est à l’origine. L’Église de France et le Saint Siège ont encouragé et soutenu ce mouvement qui s’est rapidement internationalisé. Il est aujourd’hui présent dans environ 70 pays.
Avec bien d’autres acteurs, l’expérience a montré que la réconciliation est possible et durable. Ce travail de réconciliation s’est appuyé, en partie, sur les personnes qui, entre les deux guerres mondiales, avaient déjà agi en ce sens. C’est donc un travail au long cours. C’est la paix qui gagne véritablement.
« Il faut être trois pour faire violence, le bourreau, la victime et le témoin, que celui-ci jouisse du spectacle ou qu’il détourne le regard ne change rien. Le témoin est pour le bourreau la marque du consentement dont il fait l’objet, et le silence qui l’entoure autorise son acte, le justifie presque… Il n’y a pas de spectateur innocent, jamais ». Sur toute la surface de la terre, Bruno Remaury, éditions Corti.
Chrétiens, mais aussi citoyens, nous avons de lourdes responsabilités. Responsabilité de prévenir les conflits, responsabilité de soutenir les acteurs de paix dans les conflits…, responsabilité de ne pas nous dérober à nos frères, de lutter contre notre indifférence. C’est exigeant. Patiemment, nous devons devenir des artisans de paix, maîtriser notre propre violence, accueillir la souffrance de nos frères.
Quand le Christ nous dit « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix… » (Jn 14, 27), que nous laisse-t-il, que nous donne-t-il ? Il nous donne sa vie en affrontant dans sa chair la violence du monde. Il nous donne sa parole qui nous entraîne dans une vie nouvelle. Les Béatitudes nous indiquent clairement le chemin qu’il nous faut suivre pour vivre en paix. Il nous donne sa résurrection, cette formidable espérance, pour aujourd’hui et toujours, que le mal est vaincu et que la réconciliation de l’Homme avec Dieu, avec les autres, avec lui-même est la Vie.
«Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6).
Le Christ sait que la parcours est difficile, il l’a largement éprouvé, mais il nous ouvre la voie et nous y accompagne.
En cette période pascale qui vient, accueillons avec détermination cette Vie, cette Paix. La Miséricorde est la justice de Dieu. Osons !
Hervé DORY, délégué national Pax Christi France