De la Russie à l’Amérique, en passant par l’Afrique et l’Asie, aucune région n’échappe aux turbulences actuelles qui redessinent les alliances, dévoilent de nouvelles ambitions et menacent les fondements même de la paix et de la stabilité internationale. Face à ces bouleversements menaçants, l’appel à la reconstruction d’un nouvel ordre mondial, porté par une Europe invitée à assumer son rôle de pivot, résonne comme une nécessité impérieuse.
Alfonso Zardi
De mes études désormais anciennes de géographie j’ai retenu la fascinante théorie de la tectonique des plaques qui permet, entre autres, d’expliquer, si ce n’est de prévenir, les tremblements de terre : une plaque se frotte à une autre, la bouscule et de cette friction souterraine résulte un déplacement brutal, le tremblement de terre. Aucun continent ni aucun océan n’est en soi immobile mais à des époques de stabilité apparente, avec de mouvements minimes, succèdent des ères où tout semble se remettre en mouvement, avant une nouvelle – et différente – époque de stabilité.
Ce à quoi nous assistons sur la scène internationale est une sorte de tectonique des plaques où des continents géopolitiques jusqu’ici stables et apparemment immobiles se remettent brusquement en mouvement : la première déflagration est survenue en Russie, avec sa guerre d’attrition, plus guerre ouverte à ses voisins méridionaux, puis l’Ukraine. Les secousses de ce cataclysme décennal se sont propagées à l’Ouest où elles ont précipité le rapprochement, puis éventuellement le compactage de l’Europe en un seul ensemble.
Des lignes de faille se sont ouvertes en Afrique, où un nombre croissant d’Etats tournent le dos – idéologiquement, économiquement – à l’Europe (coloniale) et plus globalement à l’Occident (décadent), pour se rapprocher des grands ensembles (totalitaires) que sont la Russie et la Chine. Entre Afrique et Asie centrale, le Moyen Orient explose sous les secousses d’une guerre sans fin à la fois idéologique et religieuse, du moins dans l’explication de ceux qui ont allumé l’incendie, alors que l’Inde se projette en continent de tous les possibles en ce début de XXI siècle.
L’Amérique se disloque à son tour : le nord est poussé à une forme d’absurde unité par des mouvements de population que personne n’arrête ni contrôle, le sud sort de son invisibilité géopolitique pour se rapprocher de Chine et Russie dans les BRICS qui se veulent « la brique » sur laquelle un nouvel ordre mondial pourra enfin se bâtir.
De ce mouvement tantôt lent, tantôt accéléré on ne voit pour l’heure que les dégâts, catastrophiques : pour les populations concernées, victimes des guerres ou poussées à l’exode, pour l’environnement mondial, qu’on ne prend plus soin de réparer, pour les mécanismes et institutions internationales créées pour gérer la paix et la stabilité et rejetées dans l’insignifiance.
Les forces qui sous-tendent ces mouvements ne sont pas « mauvaises » en soi : que des aspirations se manifestent et de nouveaux équilibres soient recherchés est en soi plus que légitime. Combien d’injustices ne restent-elles pas à réparer ! Mais la violence de l’idéologie, le chantage aux ressources économiques, la force brute des armes sont-ils les moyens justes d’y parvenir ?
L’urgence – une fois les « plaques » continentales revenues à l’équilibre – est à la reconstruction du nouvel ordre mondial, autour des Nations Unies même si tout semble pousser à les désunir ! Et l’Europe, le seul continent que toutes ces forces déchaînées semblent pousser vers plus d’unité, doit en prendre la responsabilité. Elle en a la vocation, les moyens et l’ambition : « puissance » elle se veut, qu’elle le devienne ! Pour nous assurer un nouvel avenir de paix. Voter le 9 juin, c’est aussi cela.