À nos sœurs et frères catholiques
Pour les candidats à l’élection présidentielle, c’est le moment ou jamais de convaincre. En quête d’électeurs, certains chaussent leurs bottes à la rencontre des agriculteurs, d’autres vont visiter des usines, quelques-uns, enfin, cherchent à emporter l’adhésion des catholiques. Et l’extrême droite n’est pas en reste.
« Une partie de l’électorat catholique voit en Eric Zemmour un défenseur crédible de la France et de son héritage catholique », pouvait-on lire dans une enquête du journal La Croix en décembre dernier. Mais de quel héritage catholique parle-t-on ? L’accueil de l’étranger, par exemple, n’est-il pas un devoir réaffirmé par le Christ ? Que devient ce devoir lorsque ce candidat à l’élection présidentielle dit, le 21 janvier dernier au poste frontière de Menton à propos des associations d’aide aux migrants : « Ils agissent contre la survie de la France. Je considère que ce sont des ennemis. Ils seront traités comme des ennemis1 » ?
Faudrait-il, comme il le souhaite, emprisonner Cédric Herrou qui a accueilli chez lui ceux qui fuyaient la guerre et la faim et qui a fait reconnaître la fraternité comme un principe à valeur constitutionnelle « dont découle la liberté d’aider autrui sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national 2» ?
De quel héritage catholique parle-t-on, quand on condamne les gestes d’humanité les plus élémentaires, quand on oublie la parabole du bon Samaritain où Jésus précise qui est notre prochain et en quoi ceci concerne la vie éternelle, quand on rejette ceux à qui le Christ s’est identifié : « J’étais un étranger et vous m’avez accueilli » ?
N’entendons-nous pas l’avertissement solennel du pape François: « Ou bien nous sommes frères, ou bien tout s’écroule. Et ce n’est pas une expression purement littéraire de tragédie, non, c’est la vérité ! Ou bien nous sommes frères, ou bien tout s’écroule […] Le chemin de la fraternité est long, c’est un parcours difficile, mais elle est l’ancre de salut pour l’humanité3 » ?
Chrétiens et citoyens, pouvons-nous rester silencieux devant ce qui, sous couvert de le préserver, dénature l’héritage catholique jusqu’à menacer profondément l’avenir de notre société ?
Et vous, sœurs et frères dans la foi qui soutenez le programme de M. Zemmour ou celui de Mme Le Pen, vous qui êtes sensibles aux propos de M. Ciotti ou d’autres personnes, pouvez-vous dire à vos candidats que vous souhaitez que notre pays reste une terre ouverte à ceux que l’impératif de survie a contraints à l’exil ?
Pouvez-vous leur dire, finalement, qu’être catholique, c’est avoir l’accueil en héritage ?
1Franceinfo avec AFP.
2Loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.
3Message pour la Journée internationale de la fraternité humaine, le 4 février 2022.