Le lundi 30 mars le parlement hongrois a accordé au premier ministre, Viktor Orban, les «pleins pouvoirs» d’une durée indéterminée pour faire face à l’épidémie de coronavirus qui est en train de s’abattre sur le pays. Pendant une période dont l’expiration n’est pas annoncée, mais juste liée à la fin de la pandémie, le chef du gouvernement aura pleine latitude pour gouverner par ordonnance, sans besoin de faire ratifier ses décisions par le parlement. Quiconque diffusera des informations «fausses» sera passible d’une condamnation pénale.
Face aux réactions des forces d’opposition nationales, aux critiques d’autres États membres de l’Union européenne, de la Commission européenne et aux réserves de la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, M. Orban a répondu, par la voix de son porte-parole sur le site du gouvernement, que «si le Conseil de l’Europe n’est pas en mesure d’aider, alors qu’il se taise». Par la suite, cette réponse a été retirée et remplacée par l’affirmation que la loi sur la pandémie est conforme aux principes de l’État de droit.
Nous, les organisations et mouvements d’inspiration chrétienne membres de la Conférence des Organisations Internationales Non-gouvernementales du Conseil de l’Europe, exprimons notre plus vive réprobation à l’encontre de cette réponse méprisante. Elle montre une totale méconnaissance non seulement du rôle de la Secrétaire Générale, mais surtout des droits et devoirs que l’appartenance à l’Organisation implique de la part des autorités d’un État qui y a été accueilli chaleureusement en 1990, premier des «nouvelles démocraties» issues de l’effondrement des régimes communistes dans l’est de l’Europe.
Être membre signifie non seulement respecter les droits de l’homme, les principes de l’État de droit, la démocratie, mais aussi considérer que ces droits et ces principes sont un patrimoine commun dont tous les États membres doivent se sentir solidairement responsables. Rappeler les États au respect de leurs obligations auxquelles ils ont librement consenti, mettre en œuvre le dialogue et la coopération lorsque des difficultés ou des situations exceptionnelles surgissent, accepter de revoir des choix et des comportements politiques qui sont en contradiction avec ces droits et principes: c’est cela être pleinement membre du Conseil de l’Europe.
Nous réaffirmons notre attachement à cette Organisation et aux valeurs qu’elle défend et demandons aux États membres de faire preuve de la même fidélité et du même attachement dans la défense de ce patrimoine commun qui nous a été légué par les fondateurs. Il appartient à tous les États membres et aux acteurs de la société civile de les faire vivre pleinement et fructifier.
La pandémie ne sera pas vaincue si la démocratie est humiliée ou les droits fondamentaux piétinés. Nos sociétés ne sortiront grandies de cette épreuve que si le prix à payer pour la santé recouvrée n’entraine pas le déclin de nos valeurs, de la solidarité et de la fraternité qui sont au cœur du projet européen.
Ensemble nous pouvons gagner ces combats!
Signatures:
AIC, Association Internationale des Charités
CEP, Colloque Européen des Paroisses
Justice et Paix Europe
MIAMSI, Mouvement International d’Apostolat des Milieux Sociaux indépendants
MIIC –Pax Romana, Mouvement International des Intellectuels Catholiques
OCIPE, Office catholique d’information et d’initiative pour l’Europe
OIEC, Office International d’Enseignement Catholique
Pax Christi International
Réseau Européen Eglises et Libertés
EN-REUMOFC, Union Mondiale des Organisations Féminines Catholiques
UNAEC-Europe, Union européenne des anciens et anciennes élèves de l’enseignement catholique